v Quand la Turquie s’éloigne de la Convention d’Istanbul et du reste de l’Europe
Namur, le 26 mars 2021.
La Constitution de notre pays précise bien que "les Belges sont égaux devant la loi", que "l’égalité des hommes et des femmes est garantie" et que "la jouissance des droits et libertés reconnus aux Belges doit être assurée sans discrimination" (art. 10 et 11). Or, dans ses différents aspects (notamment domestique, harcèlement sexuel, viol, mariage forcé, crimes au nom du prétendu "honneur", mutilations génitales, ...) la violence à l’égard des femmes constitue une injure à ces principes et à d’autres valeurs de nos droits humains. Tout comme il est établi, en inversant le sens du raisonnement, que "la violence à l’égard des femmes est une manifestation des rapports de force historiquement inégaux entre les femmes et les hommes ayant conduit à la domination et à la discrimination des femmes par les hommes, privant ainsi les femmes de leur pleine émancipation et les maintenant dans une position de subordination par rapport aux hommes".
Cette dernière citation est tirée des attendus de la Convention du Conseil de l’Europe du 12 avril 2011 sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d’Istanbul parce que signée dans ce lieu par tous les États membres du Conseil de l’Europe (la Turquie la première à ratifier ensuite) à l’exception de l’Azerbaïdjan et de la Russie.
Il s’agit là, sur le thème, du premier instrument juridique contraignant pour l’Europe, avec l’engagement des États signataires à prendre les mesures législatives et réglementaires nécessaires, mais aussi avec un mécanisme approfondi de suivi amenant lesdits États à présenter des rapports sur les mesures prises par eux et le comité d’experts du Conseil de l’Europe à y réagir publiquement et à formuler des recommandations.
Bien en phase avec nos valeurs démocrates et émancipatrices, je m’étais réjoui de voir la Turquie jouer un rôle majeur dans l’élaboration et l’adoption de ce cadre juridique. Cela correspondait à un carte blanche que j’avais publiée plus tôt en faveur de l’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne sur base d’une vision de diversité positive et de lien porteur avec le Moyen-Orient et l’Asie centrale. Et maintenant patatraf!... Le 19 mars dernier, par décret présidentiel, la Turquie quitte la Convention d’Istanbul (alors qu’elle avait été adoptée par le Parlement) et l’explication donnée au niveau politique est que la Convention nuisait à l’unité familiale, encourageait le divorce et servait d’instrument à la communauté LGBT (sic) (www.rtbf.be/info/monde).
La Turquie, par ses autorités, semble s’éloigner du statut du voisin proche et familier de l’Union Européenne et de nos valeurs. Ce n’est certainement pas une erreur diplomatique de rappeler celles-ci et d’agir en conséquence, donc pour l’égalité des hommes et des femmes. On sait ainsi que, dans le cadre de cette Convention d’Istanbul, la Belgique doit améliorer l’efficacité et la qualité des poursuites judiciaires pour lutter contre l’impunité. On sait aussi que les membres directement concernés du Gouvernement fédéral se réunissent d’urgence à ce sujet. On sait aussi qu’un programme de rencontres entre l’Union Européenne et la Turquie vient de démarrer, avec l’union douanière parmi les sujets: on peut (doit) en même temps critiquer des situations attentatoires aux droits humains et faciliter les flux commerciaux des entreprises de part et d’autre.
L’égalité est de toute façon un combat de tous les jours, aussi bien en solidarité avec les femmes turques qu’en "pas à pas" en Belgique. Ainsi, la parité dans les organes d’administration des agences publiques et des sociétés, comme vient de la réaliser le Théâtre national Wallonie-Bruxelles dans ses statuts.
Voici la formulation juridique, sans droits d’auteur (n’hésitez donc pas à vous en servir):
"Le.a Président.e éventuellement excepté.e, la moitié des membres du conseil d’administration sont de genre différent de celui des autres membres. Si le nombre d’administrateur.trice.s de genre différent n’atteint pas la parité requise, le.a prochain.e administrateur.trice nommé.e est de ce genre."
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