> Chronique de la vie économique wallonne : le regard de Didier Paquot
v La Wallonie politique freine la Wallonie économique
2022-04 - Namur, le 31 janvier 2022. > [pdf]
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La Une de La Libre Eco du samedi 22 janvier : "La Wallonie en faillite, un scénario catastrophe impossible ?". La Une du Trends-Tendances du 25 novembre 2021 : "La Wallonie est-elle la nouvelle Grèce ?". La dérive des finances publiques wallonnes est-elle le seul résultat tangible dont la presse puisse faire état en conclusion de 20 ans de politique de redressement ?
Après successivement le Contrat d’avenir, le Plan Marshall, le Plan Marshall 2.vert, le Plan Marshall 4.0, et maintenant le Plan de relance, on aurait pu espérer des Unes de journaux plus réjouissantes comme: "La Wallonie en plein renouveau économique, une ambition devenue réalité ?" ou "La Wallonie est-elle la région la plus dynamique d’Europe ?". Avec des articles traitant de thèmes roboratifs comme : "L’efficacité du Forem pour beaucoup dans la chute du taux de chômage à 5%", "Les entreprises impressionnées par le nombre et le niveau des personnes sortant des centres de formation", "Le nouveau schéma de l’enseignement en alternance ouvre la porte de l’emploi à des dizaines de milliers de jeunes supplémentaires", "Les incubateurs wallons à l’origine de 30 entreprises de plus de 500 personnes", "Les friches industrielles éradiquées à près de 80%", "L’activité économique de la province du Hainaut rattrape la moyenne européenne grâce à l’usage efficace de 30 ans de fonds structurels européens", "Les pôles de compétitivité ont porté l’activité industrielle au niveau de l’Allemagne".
Mais revenons sur terre, taisons notre déception et une forme de colère, restons dans la presse d’aujourd’hui. Feuilletons par exemple la page Linkedin du journaliste de La Libre, Pierre-François Lovens, infatigable soutien aux nouvelles entreprises innovantes, et prenons la mesure du dynamisme entrepreneurial qui souffle sur la Wallonie. De très nombreuses start-ups se sont créées ces 10 dernières années, elles grandissent, elles se battent pour trouver des fonds, elles séduisent des investisseurs étrangers, elles se font une place à l’international. Avec des "success stories" impressionnantes, comme Odoo, I-care ou Univercells. Des entrepeneur-e-s font à nouveau battre le cœur de l’économie wallonne, leurs entreprises remplacent peu à peu les industries traditionnelles disparues. Combien sont-elles, que représentent-elles ? Nul ne le sait vraiment, puisque les nombreux organismes publics qui s’occupent des entreprises n’ont pas embrayé sur la suggestion de votre serviteur de les répertorier pour mieux les connaître et les faire connaître, pour mieux mesurer leur poids et leur progression dans l’économie wallonne, pour mieux les encourager, pour mieux les soutenir.
On dira : "Vous êtes trop sévère avec les politiques publiques, nombre de ces entreprises ont été soutenues financièrement par les pouvoirs publics". Dont acte, certains outils financiers de la Région, comme la SRIW, Noshiaq ou Sambreinvest, ont indiscutablement joué un rôle important dans la régénérescence du tissu entrepreneurial de la Wallonie.
Au niveau des pouvoirs publics à proprement parler, d’importants montants sont aussi chaque année distribués aux entreprises sous forme d’aides à l’investissement, d’aides à la recherche, ou de subventions dans des programmes spécifiques comme "Circular Wallonia" ou "Industrie du futur". Mais la distribution de subventions aux entreprises ne constitue pas une stratégie de politique industrielle ou de R&D, sans compter que jamais ces libéralités très importantes n’ont fait l’objet d’évaluation de résultats ou d’impact. Même les tentatives pour structurer un peu les politiques économiques, comme la stratégie de spécialisation intelligente ou les programmes cités plus haut, se terminent toujours par des appels à projets pour distribuer des subventions directes. Nous reviendrons sur le sujet dans une prochaine chronique.
Pour l’heure, répétons que la nouvelle génération d’entrepreneur-e-s, et les autres aussi, ont moins besoin de subventions directes que d’un climat et d’un cadre porteurs pour leurs activités : de bonnes infrastructures (télécommunications, transports, énergie), des incubateurs de taille et de compétences suffisantes pour leur offrir un environnement stimulant et des services adéquats, des lieux où ils peuvent se développer pendant la phase de scaling up (avec des soutiens pour trouver des investisseurs privés), un cadre de vie agréable débarrassé des chancres industriels, des villes accueillantes, multilingues et connectées, des structures pour accueillir des cadres étrangers (comme des écoles internationales), des réseaux professionnels inspirants, des accès à l’international, des universités à la pointe de la recherche et ouvertes sur le monde de l’entreprise, des programmes de R&D et d’innovation ambitieux et multipartenaires, une administration compétente, souple et rapide, des charges administratives minimales. Et surtout, surtout, ces entreprises ont besoin d’une main-d’œuvre bien formée et enthousiaste, ainsi que d’une agence pour l’emploi efficace, à même de résoudre rapidement leurs problèmes de recrutement.
C’est la réalité économique wallonne : un renouveau entrepreneurial se concrétise chaque jour un peu plus, en dépit des insuffisances et des lacunes des politiques publiques. Il est vraiment urgent que l’action publique se hisse à la hauteur de la qualité et de l’ambition des entrepeneur-e-s de notre région.
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