> Chronique de la vie économique wallonne : le regard de Didier Paquot
v Interlocuteurs sociaux et Gouvernement wallons prennent date
2022-12 - Namur, le 4 avril 2022. > [pdf]
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Deux organisations syndicales (CSC, FGTB), deux fédérations d’entreprises (UWE, UCM) et une organisation environnementale (IEW) ont donc signé une déclaration commune avec le Gouvernement wallon (1) ce lundi 28 mars, qui engage les signataires à mener à bien un plan de relance resserré sur 42 projets regroupés dans 4 plans d’action prioritaire.
"Chat échaudé craint l’eau froide". L’accueil de cette nouvelle version du plan de relance wallon, qui n’en finit pas de trouver sa forme définitive, a été accueilli positivement par les observateurs mais avec prudence. On les comprend.
Après 4 plans de redressement de la Wallonie ("le contrat d’avenir" et 3 plans Marshall) qui n’ont mené à aucune amélioration sensible de la situation économique et sociale de la Région, après une très lente et brouillonne édification d’un Plan de relance décevant par son émiettement et qui, pour cette raison principale, a été remis en cause par l’Union Wallonne de Entreprises et la FGTB, il ne fallait pas s’attendre à ce que cette nouvelle version soit accueillie en confiance. On peut résumer les réactions par : "C’est très bien mais cette fois, on attend de voir avant de s’enthousiasmer à nouveau pour rien".
Pourtant, cette déclaration commune pourrait être considérée, quand l’histoire aura fait un tri dans les événements, comme le tournant tant attendu depuis 20 ans par la société wallonne pour trouver le chemin du renouveau économique et social wallon. Un accord entre les interlocuteurs sociaux et le gouvernement, ce n’est pas rien. C’est un engagement clair et commun d’œuvrer dans le même sens vers une vision commune.
Dans le cas du plan de relance wallon, une réelle co-gouvernance de ce plan va être mise en place. Un Comité d’action sera composé des représentants des partenaires de l’accord et des cabinets des vice-présidents du Gouvernement wallon, le cas échéant d’experts externes et de la secrétaire générale du SPW. Ce nombre, somme toute restreint, de personnes change des comités d’accompagnement pléthoriques qui étaient habituellement mis en place pour suivre les plans de relance précédents, comités qui n’avaient de toute façon aucune influence sur le cours des actions engagées.
Il en est tout autrement pour le Comité d’action. Le texte prévoit que "Le Comité d’action formulera des orientations sur le contenu et les modalités de mise en œuvre souhaitées pour les programmes et projets prioritaires", "des indicateurs de performance seront définis par les parties prenantes", "ces indicateurs permettront d’évaluer la performance propre de chaque projet sélectionné en matière de triple dividende (social, économique, environnemental), "Enfin, des méta-objectifs seront définis de concert […] Ces méta-objectifs devront être définis par le Comité d’action en partenariat avec le Comité d’encadrement transversal (comité d’évaluation), "Le Comité d’action pourra formuler des suggestions de réaffectation budgétaire ou de renforcement budgétaire de projet au Gouvernement […] qui objectivera les raisons qui le conduiraient ou non à prendre en compte une recommandation du Comité d’action.", "Le Comité pourra également travailler avec le Gouvernement wallon sur la définition d’une méthodologie de mise en œuvre des projets qui permettent de favoriser une maximisation des retombées positives du Plan en Wallonie".
Nous avons cité longuement le texte de la déclaration commune car il nous parait important que chacun puisse bien mesurer l’engagement que le Gouvernement wallon prend d’accorder aux interlocuteurs sociaux et environnementaux de grandes possibilités pour suivre, évaluer et influencer les actions prioritaires du plan de relance. Jamais les interlocuteurs sociaux n’ont eu tant de responsabilités dans la politique menée par le Gouvernement de la Région. A eux de les assumer pleinement. Ils devront en rendre compte devant leurs membres mais aussi devant l’opinion publique.
A ce propos, cette opinion publique et ses représentants, à savoir les parlementaires, doivent pouvoir bénéficier de la plus grande transparence et publicité sur la mise en œuvre de ce plan. Des communications régulières doivent être prévues devant le Parlement de Wallonie, tout comme des documents complets de suivi et d’évaluation doivent être rendus accessibles au grand public.
Insistons : la reprise d’un dialogue fécond entre syndicats et employeurs pourrait être un fait majeur dans l’histoire économique et sociale de la Wallonie. Durant les 20 dernières années, la difficulté de ce dialogue a certainement constitué un des facteurs empêchant le redressement de l’économie wallonne. Pour exemple, l’incapacité des interlocuteurs sociaux à se mettre d’accord au comité de gestion du FOREM sur les objectifs et leurs déclinaisons opérationnelles de l’agence wallonne de l’emploi est une des causes de l’inefficacité du marché du travail wallon et des piètres résultats de la formation professionnelle. Le développement de l’enseignement en alternance ou des stages en entreprise a aussi beaucoup pâti du dialogue difficile entre interlocuteurs sociaux.
On formule le plus cher souhait que cette première collaboration entre syndicats et patronat sur les objectifs assez globaux du Plan de relance soit suivie d’autres accords sur des sujets plus opérationnels. Par exemple, au Danemark, régulièrement, une coopération s’établit, via un accord, entre interlocuteurs sociaux et le Gouvernement, sur des sujets précis. En 2021, il y eut de tels accords sur le schéma de compensation salariale durant la pandémie, ou sur les pénuries de main d’œuvre. En 2016, il y eut un accord important sur la formation professionnelle.
Puisse la Wallonie suivre l’exemple danois. Un consensus social fort entre les interlocuteurs sociaux et le Gouvernement donne confiance à toutes les composantes de la société et les incite à collaborer plus, à s’impliquer plus, à oser plus, à réaliser plus et à être aussi plus sensible et plus comptable du bien commun.
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(1) Le document complet est disponible à l’adresse suivante: https://dirupo.wallonie.be/files/Divers/De%cc%81claration%20commune%20sur%20les%20priorite%cc%81s%20du%20Plan%20de%20relance%20wallon.pdf
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