> Chronique de la vie économique wallonne : le regard de Didier Paquot
v Wallonie économique : le Brabant Wallon et les autres provinces
2022-16 - Namur, le 15 mai 2022. > [pdf]
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Les 3 hommes politiques wallons (que des hommes !) invités à l’Les 3 hommes politiques wallons (que des hommes !) invités à l’émission de la RTBF "QR code" de ce mercredi 11 mai, et à l’évocation du retard économique de la Wallonie, se sont empressés de citer la province du Brabant wallon comme l’illustration que tout ne va pas si mal en Wallonie.
Il est vrai, comme le montre le tableau 1, que le Brabant wallon est la province la plus productive de la Belgique : son PIB (1) atteint 39.706 euros par habitant en 2020, soit 137% de celui de la Belgique. Il est même 16% supérieur à celui de la province flamande la plus performante, Anvers.
Cependant, si on tient le raisonnement jusqu’au bout, on doit malheureusement constater que la réussite du Brabant wallon sauve peut-être quelque peu la performance de la Wallonie (malgré tout calé à 73% de la Belgique) mais que surtout elle éclaire cruellement les piètres résultats des autres provinces wallonnes dont le PIB par habitant oscille entre 60% et 70% de celui de la Belgique.
Encore plus préoccupant, comme le montre le tableau 2, la stabilité de la production par habitant de la Wallonie par rapport à la Belgique entre 2003 et 2020 est uniquement due au progrès extraordinaire du Brabant wallon sur cette période, puisque les autres provinces wallonnes témoignent toutes d’une détérioration de leur production (par habitant) au regard de la Belgique. Ces chiffres jettent à nouveau une lumière très crue sur la faillite des politiques de redressement menées en Wallonie depuis 20 ans, mais aussi sur l’échec des politiques structurelles, financées par les fonds européens (pendant plus de 25 ans) et concentrées sur la province du Hainaut et, mais dans une moindre mesure, sur celle de Liège.
Mais une autre conclusion riche d’enseignement est donnée par le tableau 3 : l’explosion de la performance économique du Brabant wallon sur les 15 dernières années n’a en rien profité aux autres provinces wallonnes. Le PIB par habitant de celles-ci variait en 2003 entre 65% et 70% de celui du Brabant wallon. Il se situe en 2020 entre 45 et 50%. Une perte de 20% sur un peu plus de 15 ans. Il n’y donc eu aucun effet de débordement ou d’entrainement de la province du Brabant wallon sur les autres provinces.
Sous l’angle de la dynamique économique, en Wallonie, il y a le Brabant Wallon et le reste de la Wallonie. Les facteurs de développement économique du Brabant wallon sont spécifiques à cette province et ne se retrouvent pas dans les autres. On peut les citer : la proximité de Bruxelles, la présence d’une université d’une réputation internationale grandissante, une population au niveau d’éducation élevée attirée par des conditions de vie très agréables, une vraie dynamique entrepreneuriale, l’absence du poids d’une vieille industrie, ce qui comporte deux grands avantages : celui de ne pas trainer pendant des décennies des activités industrielles déclinantes et celui d’être affranchi de la reconversion des sites pollués par l’industrie lourde. Tous ces atouts ont permis le développement d’une industrie neuve et performante, essentiellement (mais pas que) pharmaceutique.
Ces conditions de développement économique du Brabant Wallon fortement liées à Bruxelles, conduisent les économistes qui mènent des études économiques sur le développement des régions d’Europe à grouper le Brabant wallon (et le Brabant Flamand) avec Bruxelles pour constituer une région métropolitaine, distincte des autres provinces du pays. C’est le cas de l’étude sur les "pièges de développement" dont peuvent être victimes les régions d’Europe (et dont nous avons rendu compte dans la chronique du 21 février 2020 (2)). C’est le cas aussi pour le calcul de l’indice européen régional de compétitivité qui sera abordé dans la prochaine chronique.
Qu’impliquent ces constats pour les politiques régionales ? L’absence d’interconnexions significatives entre les économies des provinces pourrait venir justifier les actuelles politiques provinciales qui sont essentiellement regroupées dans les nombreuses intercommunales ou les sociétés financières comme les Invests locaux. Les politiques d’emploi sont aussi développées à des niveaux sous-régionaux. Mais ces actions provinciales, sans un pilotage et une coordination régionale suffisamment forts, n’atteignent pas l’efficacité voulue. On tombe souvent dans un sous-régionalisme concurrentiel et étriqué, entraînant doublon d’actions ou réduction des économies d’échelle possibles. L’équilibre est donc difficile à trouver. Mais il vaudrait la peine d’être recherché.
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(1) PIB= Produit Intérieur Brut: l’ensemble de la production d’un territoire en un an exprimé dans une monnaie, ici l’euro.
(2) https://www.institut-destree.eu/2022-02-21_chronique-economique_didier-paquot.html
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