> Chronique de la vie économique wallonne : le regard de Didier Paquot
v Le bon moment pour remettre la Wallonie au travail
2021-33 - Namur, le 11 octobre 2021. > [pdf]
L’économie belge connaît une forte reprise depuis le début de l’année 2021. La croissance de l’activité économique (PIB réel) s’est accélérée tout au long de l’année, de 1% (trimestre sur trimestre) au premier trimestre 2021, 1,7% au deuxième trimestre. Une croissance de 1,8% est prévue au troisième trimestre. A chaque fois, l’intensité de la reprise a surpris, surpassant les prévisions, pourtant déjà optimistes.
Conséquence : l’emploi salarié s’est aussi accru lors du premier trimestre 2021. Selon les chiffres de l’ONSS, il a augmenté de 0,7%, contre 0,2% au trimestre précédent. Il est d’ailleurs intéressant de noter que l’emploi salarié n’a pas diminué depuis le début de la pandémie, notamment grâce aux mesures de chômage temporaire prises par le Gouvernement fédéral.
Cette croissance significative de l’emploi a conduit à une diminution du chômage depuis quelques mois, si bien que, en septembre 2021, le nombre de demandeurs d’emplois a baissé de 5,4% par rapport au même mois de 2020, revenant à 201.797 unités. Ce qui correspond à un taux de chômage (1) de 12,6%, contre 13,3% en septembre 2020. Il est même descendu à un niveau plus bas que septembre 2019 (13%), pourtant une période de haute conjoncture.
Cependant, ce taux de chômage n’est pas le taux de chômage "officiel", car il ne correspond pas à la définition internationale du Bureau International du Travail (BIT) (2), acceptée par la plupart des pays et qui permet donc une comparaison internationale. Bien qu’il faille manier avec prudence ces statistiques trimestrielles qui connaissent de fortes fluctuations, sans doute imputables en partie à la fébrilité des méthodes statistiques, le taux de chômage wallon BIT a baissé au deuxième trimestre 2021 à 8,2%, contre 9% au premier trimestre, mais encore au-dessus des 7% de la fin 2019.
Un autre indicateur qui montre une reprise de l’emploi est l’augmentation de 30% des offres d’emplois déposées au FOREM (l’agence régionale wallonne de l’emploi) en septembre 2021 par rapport à septembre 2020, soit un total d’à peu près 40.000 offres d’emploi.
On dira : 40.000 offres d’emplois, c’est bien maigre pour 200.000 chômeurs, alors à quoi bon motiver les demandeurs d’emplois s'il n’y a pas d’emplois pour tout le monde. Le raisonnement n’est pas juste, c’est en termes de flux qu’il faut envisager le marché de l’emploi et non en termes de stock. Selon les chiffres qu’Olivier de Wasseige (administrateur délégué de l’Union Wallonne des Entreprises) a cité devant une Commission du Parlement de Wallonie (3) lors de l’examen du décret "accompagnement des demandeurs d’emploi" (4), il y a environ 1 million d’offres d’emplois par an qui circulent en Wallonie, dont grosso modo 50% transitent par le FOREM, et il y a environ 400.000 personnes qui passent par le FOREM chaque année. Il y a donc, dans le continuum du temps, suffisamment d’offres d’emplois pour permettre à chacun-e des demandeurs d’emplois d’avoir une chance de trouver une occupation, même temporaire, si il/elle en a la motivation et les compétences.
La deuxième objection défaitiste, après celle d’un manque d’emplois, tient dans la nature des emplois proposés. Ils ne seraient pas attractifs, trop durs, trop mal payés. Certes, une frange des offres d’emploi relève peut-être de cette catégorie, encore faudrait-il bien objectiver ces évaluations. Mais la très grande majorité des emplois sont plus qu’acceptables, à en juger par les secteurs dont ils émanent. Les offres d’emplois ont principalement augmenté, en pourcentage, dans les secteurs des services collectifs, sociaux et personnel, des services financiers, du transport et de l’entreposage, du secteur manufacturier. En volumes, les plus grosses croissances des offres d’emplois se situent dans le secteur du commerce et des services aux entreprises. Le secteur de la construction, que l’on cite toujours pour argumenter sur les métiers pénibles, représentent 7,5% du total des offres du mois de septembre, et certainement que toutes ne sont pas "pénibles".
On pourrait faire la même analyse des emplois vacants. 22% de ces emplois vacants relèvent du secteur non-marchand, 17% du secteur des sciences et services, 14% du commerce, 12% de l’industrie, et seulement après viennent la construction (10%) et l’HORECA (7%). Il y a fort à parier que la plupart des emplois vacants ne sont pas pénibles au point de ne pouvoir être pourvus. Il n’y a donc aucune raison à ne pas inciter les demandeurs d’emploi à saisir ces emplois.
Les offres d’emplois sont là et vont encore augmenter, car les prévisions d’activité sont encore bonnes pour la fin de 2021 et l’année 2022. Il faut profiter du vent dans le dos. L’emploi appelle l’emploi, une spirale positive est en constitution, c’est le moment de la consolider et de l’amplifier. Plus vite les entreprises pourront recruter le personnel dont elles ont besoin, plus vite l’activité économique augmentera, plus vite une nouvelle vague d’offres d’emplois se formera.
C’est le rôle de l’agence wallonne de l’emploi, le FOREM, de faciliter et de soutenir le rythme de la remise à l’emploi, en accompagnant et en stimulant les chômeurs dans leurs recherches d’emploi, en opérant un bon "matching" entre les demandeurs d’emploi et les entreprises, en donnant les formations appropriées dans les compétences recherchées. Le FOREM peut améliorer de manière décisive l’avenir économique et social de la Wallonie, sans doute plus que toute autre institution wallonne.
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(1) Ce taux de chômage (dit “administratif”) est le rapport entre le nombre de personnes inscrites au FOREM comme demandeurs d’emploi et la population active.
(2) Selon la définition du BIT, est chômeur-euse celui ou celle qui n’a pas travaillé dans la semaine qui précède, cherche un emploi activement et est en capacité d’accepter un emploi immédiatement. Le nombre de chômeurs est calculé à partir d’une enquête trimestrielle auprès de la population, dans le cadre plus global de l’enquête sur les forces de travail.
(3) https://www.youtube.com/watch?v=8vGC1nmg2tg
(4) Ce décret a été le sujet d’une chronique précédente : https://www.institut-destree.eu/2021-08-30_chronique-economique_didier-paquot.html
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