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9 décembre 2023 : Gabriel Denamur

Stèle située à Furfooz (rue des Aiguilles de Châleux)

Le 29 mai 1953, Edmund Hillary et son sherpa, Tensing Norgay, atteignent le sommet de l’Everest. Ils sont les premiers hommes à réussir l’ascension totale de la montagne la plus haute du monde. L’exploit aura un retentissement mondial, faisant naître des vocations aux quatre coins du monde et la multiplication des expéditions vers les sommets de l’Himalaya.

En 1991, du haut de ses 28 ans, Gabriel Denamur est déjà un alpiniste chevronné, statut indispensable pour se joindre à une expédition internationale dirigée par le Polonais Krzysztof Wielicki et qui ambitionne de vaincre l’Annapurna, l’un des dix plus hauts sommets du monde.

En raison des dangers et des difficultés de son ascension, l’Annapurna reste en-dehors des expéditions commerciales. Son sommet, par la face sud ou par la face nord, nécessite de réels talents. Dans l’un des deux groupes de l’expédition internationale, celle qui emprunte la voie dite Bonington, figurent deux femmes : la Polonaise Wanda Rutckiewicz et l’Anversoise Ingrid Baeyens.

Le 22 octobre 1991, Rutckiewicz, une des meilleures alpinistes de sa génération, deviendra la première femme à vaincre en solo l’Annapurna par la face sud. Le lendemain, Baeyens parviendra à l’imiter; l’année suivante, cette dernière sera la première femme belge à atteindre le sommet de l'Everest, tandis que la Polonaise perdra la vie dans sa tentative d'ascension du Kangchenjunga (le plus haut sommet indien, avec 8.586 m) via la route de la face sud-ouest.

Mais revenons au 19 octobre 1991. Avec un coéquipier polonais, Kazimierz Stepien, Gabriel Denamur entreprend l’ascension de l’Annapurna et de ses 8.091 mètres d’altitude, sans sherpa ni bouteille d'oxygène. Le lendemain, 20 octobre, c’est en solo que Denamur décide de quitter le camp n°3, à 7.300 mètres d’altitude, et d’atteindre son objectif.

Né à Merbes-le-Château, Gabriel Denamur exerce le métier de programmateur informatique. Lors de stages organisés par la province de Hainaut, il s’est formé à l’escalade du côté de Freyr et de Furfooz. Il a bénéficié des conseils avisés de deux formateurs originaires du Hainaut, Octave Vander Stuyft et Jean Bourgeois. Le premier, surnommé "Caillou", était un professeur d’éducation physique et un grimpeur particulièrement perfectionniste. Le second avait réussi, en 1982, à atteindre le sommet de l’Annapurna par la face sud et tout le monde l’avait cru mort, quand soudain il réapparut au camp de rassemblement de Katmandou : il avait redescendu l’Annapurna par la face nord…

Le 20 octobre 1991, Gabriel Denamur n’emporte ni sac de couchage, ni matériel de bivouac, ni nourriture supplémentaire, ni matériel de cuisine. Il n’y a que lui et la montagne qui se dresse face à lui. Personne ne le verra jamais plus. Ni Stepien qui suivra son chemin à quelques heures de distance, ni l’autre groupe polonais présent sur la face nord, ni une équipe russe en ascension par la face ouest. L’espoir de le retrouver à Katmandou laissera rapidement la place à l’hypothèse que Denamur a atteint le sommet dans l’obscurité, et qu’un faux pas a provoqué sa chute fatale dans une zone inexplorée. Son corps ne sera jamais retrouvé. Il est ainsi le 46e homme à perdre la vie sur les flancs de cette montagne depuis 1970.

Afin d’entretenir le souvenir du sportif-explorateur, un monument a été érigé à Furfooz, à côté de l'ancien refuge dont Octave Vander Stuyft, l’un de ses instructeurs, était le propriétaire. Il s’agit d’une initiative privée, dans un espace privé, mais incontestablement visible depuis l’espace public. À quelques centaines de mètres, se trouvent de très belles falaises de calcaire qui surplombent la Lesse (Aiguilles de Châleux), et un peu plus loin se dresse le massif rocheux de Freyr qui surplombe la Meuse.