La Constitution belge précise clairement que "Les Belges sont égaux devant la loi" (art. 10) et que "la jouissance des droits et libertés reconnus aux Belges doit être assurée sans discrimination" (art. 11). En posant les bases de la régionalisation et de la communautarisation de notre pays, la même Constitution a induit que, dans le cadre des compétences fédérées, des politiques différentes soient menées par les pouvoirs concernés, brisant l’uniformité et amenant l’asymétrie. Cette précision était importante à faire: l’asymétrie décisionnelle par rapport au principe d’égalité des Belges ne peut provenir que de l’exercice de leurs compétences par les entités fédérées et non pas par le pouvoir fédéral.
Architecture institutionnelle
On sait que le pouvoir flamand actuel (et les précédents aussi) considèrent que l’organisation institutionnelle actuelle n’est pas un point final et demande une profonde révision. La structure étatique est estimée trop complexe, avec pour effet que des compétences ne peuvent être exercées de manière suffisamment efficace ou transparente.
Dans cet esprit, une réflexion a été entamée au Parlement flamand dans le cadre d’un groupe de travail intitulé "Affaires institutionnelles" où des auditions ont été organisées du 18 janvier 2021 au 28 mars 2022. Ce groupe était composé de députés des trois partis gouvernementaux (Karl VANLOUWE, Liesbeth HOMANS et Kris VAN DIJCK pour la N-VA, Peter VAN ROMPUY et Koen VAN d'en HEUVEL pour le CD&V et Gwendolyn RUTTEN pour l'Open VLD).
Il vient d’en résulter une note conceptuelle pour une nouvelle réglementation - quant à l’optimalisation de l’actuelle répartition des compétences ("Conceptnota voor nieuwe regelgeving over de optimaliseriing van de huidige bevoegdheidsverdeling") (1).
Le point de départ de leurs propositions d’amélioration de la structure étatique en Belgique tient en la constatation de la fragmentation ("versnippering") des compétences entre l’État fédéral et les entités fédérées. Il est, selon le groupe de travail, possible, sans attendre de révision constitutionnelle, de s’attaquer avant 2024 à des goulots d’étranglement spécifiques ("bepaalde knelpunten aan te pakken"). Trois types de modalités sont énumérées (2):
- l’exercice asymétrique des compétences fédérales afin de mettre sur pied des politiques adaptées aux besoins et dynamiques spécifiques des Régions et des Communautés et conformes aux politiques que celles-ci mènent dans les matières où elles sont compétentes;
- une interprétation et une application correctes de la répartition actuelle des compétences et, en cas d’incertitude ou de lacunes, la recherche de solutions concertées;
- l’actualisation et la rationalisation des instruments et formes de concertation et de coopération, ainsi que le renforcement de la représentation des entités fédérées dans les organes d’administration et de gestion fédéraux.
Retour à la situation juridique actuelle
Sans se prononcer sur le fond quant à ces revendications présentées par leurs auteurs comme conformes à l’état actuel du droit, il paraît utile à ce stade de renvoyer à l’avertissement de début de cet article, en rappelant que l’asymétrie et la discrimination entre citoyens belges de Régions différentes ne peuvent provenir que de l’exercice correct de leurs compétences par les entités fédérées à l’échelle de leur territoire. Le pouvoir fédéral ne peut organiser de telles discriminations. Et le contenu même des compétences fédérales comprend actuellement tout ce qui n’a pas été attribué formellement aux Régions et aux Communautés par la Constitution et les lois portées en vertu de celle-ci. Il s’agit là de la situation résultant de l’absence jusqu’à présent de disposition constitutionnelle déterminant les compétences exclusives de l’État fédéral. En d’autres termes, actuellement, toute matière ne figurant pas dans les compétences des entités fédérées (fixées par loi à voter à la majorité renforcée) (2) fait partie des compétences de l’État fédéral. Actuellement, le "doute profite" donc au fédéral.
Quoi qu’il en soit, malgré l’intérêt de clarifier les compétences, mais aussi compte tenu de l’inopportunité de voir remise en cause l’égalité des Belges devant la sécurité sociale, cette note conceptuelle traduit l’impatience flamande de réformer l’État. Il est en tout cas souhaitable que l’on se prépare aussi du côté wallon (3).
_________________________
(1) Vlaams Parlement, 1347 (2021 - 2022) - Nr. 1, ingediend op 24 juin 2022 (2021 - 2022)
(2) La loi spéciale doit alors être adoptée à la Chambre des Représentants et au Sénat:
- à la majorité des 2/3 des membres
- à la majorité des suffrages de chaque groupe linguistique
- avec la condition de quorum que la majorité des membres de chaque groupe linguistique se trouve présente lors du vote
(3) Cf. la contribution de l’Institut Destrée (Un fédéralisme fort et simplifié), 13 juin 2022.
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